Le paysage bancaire des startups africaines s’assombrit avec l’annonce de Mercury, la banque numérique basée à San Francisco, qui a décidé de fermer les comptes d’utilisateurs dans treize pays africains d’ici le 22 août 2024. Cette décision, motivée par des préoccupations réglementaires, laisse de nombreuses entreprises en quête de solutions alternatives. Les restrictions touchent non seulement les utilisateurs de ces treize pays, mais également des utilisateurs dans 37 pays au total, mettant en lumière une crise bancaire qui pourrait freiner l’essor des startups sur le continent.
Mercury, qui avait initialement émergé comme un partenaire bancaire de choix pour les startups africaines après la faillite de la Silicon Valley Bank en mars 2023, semble maintenant se retirer face à des pressions réglementaires croissantes. Des courriels obtenus par TechCabal révèlent que la banque change sa manière de déterminer l’éligibilité des comptes, excluant désormais les entreprises basées dans des pays considérés comme à haut risque.
“En raison des récents changements dans la façon dont nous déterminons l’éligibilité des comptes, nous ne sommes plus en mesure de prendre en charge les comptes des entreprises ayant des adresses associées situées dans ces pays”, indiquent ces courriels.
Le fait que certains des pays touchés figurent sur la liste grise du Groupe d’action financière (GAFI) n’aide en rien leur cause. Cette classification impose des vérifications supplémentaires pour les entreprises, créant un climat de méfiance qui complique encore davantage l’accès aux services bancaires. Dans un contexte où le Nigeria est perçu comme un pays à haut risque en matière de corruption et de criminalité financière, les startups africaines se retrouvent piégées entre des exigences réglementaires rigoureuses et un accès limité aux services financiers.
Les treize pays concernés – Burundi, Cameroun, République Centrafricaine, République Démocratique du Congo, Congo, Libéria, Mali, Mozambique, Nigeria, Somalie, Soudan du Sud, Soudan et Zimbabwe – sont désormais confrontés à un vide bancaire. Les entrepreneurs de ces régions, qui dépendaient de Mercury pour gérer leurs opérations et attirer des investissements, doivent maintenant se démener pour trouver des alternatives viables. Cette situation n’est pas seulement un coup dur pour les startups, mais également pour l’écosystème entrepreneurial africain dans son ensemble.
Un cadre d’une fintech nigériane, souhaitant rester anonyme, a exprimé l’idée que la fermeture des comptes est une réponse simpliste à des problèmes complexes. “Il est plus facile de fermer tous les comptes nigérians que de consacrer des efforts supplémentaires à la vérification de la légitimité”, a-t-il déclaré. Cette stratégie de réduction des risques pourrait avoir des conséquences dévastatrices pour les entreprises qui se battent pour survivre dans un environnement déjà difficile.
Les répercussions de cette décision de Mercury s’inscrivent dans une tendance plus large de répression réglementaire aux États-Unis, où les banques commerciales sont sous pression pour limiter leur exposition aux startups fintech. Les problèmes d’insolvabilité rencontrés par des banques comme la Silicon Valley Bank ont suscité des inquiétudes quant à la solidité du secteur, incitant des partenaires comme Mercury à adopter une approche plus conservatrice. Les startups africaines, déjà aux prises avec des défis structurels, doivent maintenant naviguer dans un paysage bancaire de plus en plus hostile.
“Il y a environ 18 mois, l’une des banques partenaires de Mercury a limité les transferts vers une tonne de pays (y compris le Nigeria, bien sûr) à une limite de 10 000 $. Donc, si vous vouliez envoyer 300 000 $ au Nigeria, vous auriez dû faire 30 transferts, qui seraient signalés”, souligne Tomiwa Aladekomo, un fondateur de start-up de technologie des médias qui utilise Mercury, à TechCabal. “La nouvelle règle est donc probable parce que l’une de ses banques partenaires a insisté.”
Dans un contexte où les banques comme Mercury sont devenues des piliers pour les startups technologiques nigérianes, les alternatives commencent à émerger. Des entreprises comme Brex, Ramp et Wise, ainsi que des fintechs locales comme Leatherback et Raenest, pourraient offrir des solutions viables. Cependant, la transition vers ces nouvelles options nécessitera du temps et des ressources, des luxes que beaucoup de startups ne peuvent pas se permettre.